L’editorial du 12 au 19 mai

vendredi 12 mai 2017 par Radio-Grésivaudan

Je n’en parlerai pas, c’est promis. Tout a été dit et qu’ajouterais-je de pertinent, clampin que je suis dès qu’il faut commenter ce que les uns et les autres ont déjà abondamment nourri de gloses diverses et parfois même colorées, entre flashs et confidences , entre larmes et clameurs. Je dois dire qu’il m’en coûte et que j’aurais aimé participer à ce qu’il faut bien considérer comme exceptionnel et que même ma crémière en fut toute retournée. Il est vrai que pour celles et ceux dont la sensibilité est vive il y avait de quoi ébranler l’édifice fragile des humeurs et des inclinations.
J’ajouterai pour ma part que la problématique existe qui suppose que soit bien définie la limite entre le grave et le futile, entre l’incontournable et l’incongru, entre hasard et nécessité. Que dire, que faire, où commencer , où terminer ; d’où parler et pourquoi ? Car enfin, qu’est-ce qui justifie cette façon d’intervenir, fut-ce à la marge , sur un phénomène que même les plus avertis n’avaient pas anticipé, comme si l’opacité ambiante des cœurs et des esprits privait de tout recul, recul qu’ils n’avaient même pas envisagé, convaincus qu’ils étaient pourtant de leur supériorité intuitive, au risque de tordre toute information qui de près ou de loin caressait leur ego dans le sens du poil, entre silences et clameurs, dans l’arène improbable où s’affrontent benêts et professionnels .
Car, comme le souligne mon ami Marcel, qui est loin d’être un con, la vérité est relative et l’heure implacable. Tout cela pour dire que le risque existe -et qu’il est même inévitable à l’heure où j’écris- de considérer ces événements comme de simples épiphénomènes malgré l’émergence de ce qu’il faut bien appeler des scories , quand l’incontournable s’impose comme orgasme ontologique, quoi qu’en disent les commentateurs chagrins au carrefour de l’indicible et de l’obscène.
Qu’on ne s’y trompe pas. Aucune aigreur, aucun ressentiment de ma part à un moment où s’exalte la ferveur. Mais comment céder aux appels de la multitude sans renoncer à l’intime et à cette réserve que j’appelle la pudeur de l’âme. Les exemples ne manquent pas qui décrivent la lente décomposition des bavards et des épiciers du verbe. Il faut raison garder et ne pas confondre abondance et pléthore et se rappeler, toujours, comme le dit mon ami Marcel, qui est loin d’être un con, qu’un sac vide ne tient pas debout. Et honte à celles et ceux qui de près ou de loin participent au bradage de la raison , à un moment où vacillent l’ordre et ses gardiens, où s’embrasent les cœurs et les corps, sur fond de grisaille et de rock affadi.
J’entends déjà le chœur des commentateurs aigris : « Entre abstinence et abstention il faut choisir. Où vous situez vous ? ». Pourquoi devrais-je satisfaire aux injonctions du moment ? Et s’il me plaît, à moi, de parler pour ne rien dire ? Je revendique cette austérité du logos, ces moments rares où pour une fois on ferme sa gueule, où l’on renonce au bavardage et où l’on jouit de l’inanité et du non-dit, de ce silence impressionnant où fleurissent la pivoine et l’églantine des sages et des fous.
Suffit !

MA

24 Floréal CCXXV


Soutenir par un don