Depuis quelques semaines, les haut-parleurs médiatiques gardent le crachoir braqué sur la région Grenobloise. Ils assènent lecteurs, téléspectateurs et auditeurs de coups de chiffres encombrants ; du côté du Daubé du 4 décembre on résume les zadistes à des « militants de tendance anarchiste ou d’extrême-gauche soutenus par des élus écologistes » et le 7 décembre, ils se masturbent le stylo en se posant la question : ces contestataires (hors associations), sont-ce des forcenés « anti-Etat » ou plutôt des écolos ? En d’autres termes, sont-ils mobilisés parce qu’ils ne sont de toute façon que des « anti-tout » ou parce qu’ils sont animés par de véritables convictions écologistes ? Bref depuis quelques semaines, on parle quasiment tous les jours de la contestation contre le projet d’implantation de Center Parcs à Roybon, on donne la parole aux pros, aux antis, on va aux conférences de presse et aux rassemblements et on en fait des comptes rendus. On fait son taf de plumitif, quoi. Au moins, cette résonance médiatique permet que du pied de la Chartreuse jusque dans les cafés parigots, on perçoive les rumeurs d’une lutte qui gronde, d’une lutte qui a du sens et qui doit faire écho. Evidemment, à la condition de se construire son propre point de vue en épluchant les journaux et les sites internet, de trier et recouper les sources et les infos, en évitant d’avaler tout rond ce qui nous tombe dans le bec, quoi.
Cette lutte pour le respect de la nature, contre un projet faisant partie de la longue liste des « projets inutiles et démesurés » mérite que l’on s’y penche, mérite que l’on en comprenne les enjeux environnementaux. Je veux dire par là que plutôt que de braquer les projecteurs sur les profils des gens qui se positionnent contre cette lutte, plutôt que de vouloir à tout prix étiqueter ces « zadistes » et les mettre dans un moule, ne serait-il pas plus intéressant (et constructif) de s’intéresser précisément à la zone qu’ils défendent ? Quelles seraient les conséquences directes de l’implantation d’un Center Parcs dans la forêt des Chambaran ?
Certains journaux mentionnent l’impact économique, l’emploi, mais pensent-ils seulement à l’impact environnemental ? Finalement, dans l’histoire, n’est-ce pas la forêt, dans toute sa grandeur, avec tout ce qu’elle apporte, qui devrait être mise en avant ? Ne se trompent-ils pas de sujets ?
Mais ce qui me chagrine le plus, c’est que j’ai l’impression que ce projet et la contestation qu’il y a autour n’ont de retentissement médiatique que suite au remue-ménage du mois d’octobre qu’a impliqué la mort de Rémi Fraisse. L’acronyme ZAD semble être devenu le mot qui fait frissonner d’un côté les puissants, craignant peut-être une nouvelle bavure ou plutôt un nouveau soulèvement populaire pouvant entacher leur réputation, et de l’autre exciter les médias, sachant très bien que ces histoires de ZAD, désormais un peu plus connues, pourraient allécher un peu plus de lecteurs, auditeurs, téléspectateurs...
Je suis donc partagée : à la fois contente qu’une telle lutte soit relayée sur le plan national quasi au quotidien, et à la fois suspicieuse quant aux réelles intentions de ceux qui en font leurs unes... quelques sites internet mis à part... (pour se faire son opinion et lire des revues de presse, le blog de la zad : http://zadroybon.wordpress.com/ qui propose, par exemple, cet article : http://www.bastamag.net/Center-Parcs-en-Isere-le-projet et celui de l’asso Pour les Chambaran Sans Center Parcs, qui met à disposition plein de documents pour comprendre le projet http://www.pcscp.org/).
E.P